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Quand j’étais petit, les médecins fumaient. À l’hôpital! Devant des patients! À l’université, mes collègues fumaient en classe! Alors que les compagnies de tabac savaient depuis longtemps que la cigarette était néfaste pour la santé humaine, elles finançaient des études qui disaient le contraire et discréditaient les études indépendantes qui suggéraient que le tabac était problématique. Et nos gouvernements se fiaient à leurs études bidons.
Aujourd’hui, rares sont les médecins ou les chercheurs qui vous diraient que le tabac est inoffensif!
Pour une science et un financement indépendants
En ce qui concerne les pesticides, par contre, de récents reportages à Radio-Canada et au quotidien Le Devoir nous démontrent que nous avons encore beaucoup de pain sur la planche.
Certains chercheurs prétendent que des pesticides que l’on développe justement pour tuer des insectes, des herbes ou des champignons, ne comportent aucun risque pour la santé humaine ou pour les espèces non visées (les insectes utiles, comme les abeilles, les oiseaux, les grenouilles, etc.). Ces chercheurs sont généralement soutenus par les manufacturiers et distributeurs de ces produits.
L’Agence fédérale qui homologue les pesticides au Canada a récemment avoué à un journaliste qu’elle utilise principalement les études de l’industrie pour déterminer la sécurité et l’efficacité d’un produit.
Les récentes enquêtes des journalistes Thomas Gerbet de Radio-Canada et Sarah Champagne du Devoir démontrent par ailleurs que le financement public octroyé à certains chercheurs indépendants du Centre de recherche sur les grains est contrôlé par l’industrie et les puissants lobbys agricoles.
Des chercheurs ont récemment lancé un cri du cœur dans une lettre ouverte demandant que les fonds pour la recherche dans ce domaine soient augmentés et distribués à des chercheurs ou des centres de recherches complètement indépendants de l’industrie.
Alors que Québec vient de restreindre la vente de cinq pesticides parmi les plus dangereux et qu’Ottawa réfléchit à encadrer peu plus l’utilisation des néonicotinoides, ces pesticides tueurs d’abeilles, le moment serait bien choisi pour repenser le financement de la recherche dans ce secteur.
Si la recherche financée par l’industrie ne doit pas être notre seule source d’information, les conseils agronomiques aux agriculteurs doivent eux aussi être indépendants. Encore une fois, les journalistes ont démontré dans les derniers jours que ce n’était actuellement pas le cas. Le gouvernement doit pourtant s’en assurer. Il pourrait soit financer des agronomes indépendants, comme le propose l’Union des producteurs agricoles, ou embaucher ses propres agronomes, comme le propose le Syndicat de la fonction publique.
La menace des pesticides est majeure et a des impacts sur la santé des femmes enceintes, des enfants, des agriculteurs et de leur famille et de toute la population. Je suis prêt à parier que dans 20 ans, nous réaliserons que cette menace est aussi grande que celle du tabac.
Or, les alternatives à l’utilisation de la vaste majorité des pesticides existent et souvent coûtent moins cher que les pesticides de synthèse, tout en protégeant les rendements agricoles!
Les gouvernements ont commencé à agir pour réduire le tabagisme lorsqu’ils ont arrêté de croire les études partiales de l’industrie.
A quel moment nos gouvernements agiront-ils pour éliminer les pesticides?
Publié à l'origine le 22 mars 2018 dans le journal Metro.