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Rien ne résiste au rouleau compresseur de la nouvelle politique industrielle du gouvernement du Québec.
Et ce ne sont pas les exemples qui manquent…
À Bécancour, le ministère des Transports refait des sections de l’autoroute 30 pour faciliter le transit des camions qui se déplacent vers le chantier des usines de batteries, qui seront construites en partie sur des terres agricoles. Idem pour Northvolt en Montérégie pour qui les contribuables financent une nouvelle route à hauteur de 22 millions $ en prévision du chantier de la méga usine.
Pendant ce temps-là, la Vérificatrice générale du Québec nous apprend que 50 % des routes du Québec sont en mauvais état, en raison notamment de l’accaparement des ressources pour de nouvelles routes ainsi que des travaux d’urgence nécessaires pour parer aux conséquences des changements climatiques sur les infrastructures.
En plus du ministère des Transports, d’autres ministères mettent l’épaule à la roue de cette nouvelle politique industrielle. On va rapidement donner toutes les autorisations environnementales nécessaires pour que l‘usine de McMasterville soit rapidement construite et ce, après avoir refusé un projet de développement résidentiel parce qu’il portait atteinte à la conservation de la biodiversité. Cherchez l’erreur.
Un contraste frappant (et gênant)
Quand on prend un pas de recul face à ces actions, les milliards d’aide publique accordés aux fabricants de batteries au nom de la transition énergétique contrastent particulièrement avec les limites de financement imposées aux sociétés de transport collectif.
Pendant qu’on multiplie les annonces de projets d’usine de batterie, le gouvernement semble trouver qu’on a trop de projets de transport collectif! On a récemment fait passer à la trappe le tramway, le projet phare de mobilité durable de la Ville de Québec. Le titre de mobilité durable est bien accessoire dans la désignation officielle du ministère des Transports, ce que la ministre reconnaît elle-même.
Pendant qu’on déroule le tapis rouge industriel, on laisse les alternatives de transport durable les deux pieds dans les sables mouvants.
On en vient ainsi à oublier que ceux et celles qui habitent le territoire québécois devraient prioritairement être bénéficiaires de cette transition. Bien des gens se demandent, avec raison, quelles sont les applications concrètes de la vision gouvernementale de la transition énergétique. Pourquoi devrions-nous développer de nouvelles capacités de production énergétique si seules quelques entreprises chouchoutées avec nos taxes et nos impôts pourront en bénéficier?
L’urgence sélective de Pierre Fitzgibbon
Récemment, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie expliquait pourquoi il fallait réduire le fardeau administratif lié à l’approbation pour la construction de barrages. En pleine urgence climatique, ces délais n’ont pas leur place, disait-il devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).
Des délais qui n’ont pas leur place en pleine urgence climatique? Nous disons bravo!
Ça fait du bien d’entendre un ministre être réaliste quant à l’urgence climatique. Mais ce serait bien que l’urgence ressentie par Pierre Fitzgibbon se reflète dans les décisions et les actions de son patron et des autres ministères. Ce serait bien que le tout se reflète dans les services à la population, le bien-être de nos collectivités et la protection de notre territoire.
J’écoute le ministre Fitzgibbon nous parler de l’augmentation de la production pour le développement industriel et je me demande encore si ce sont seulement une poignée d’entreprises qui vont bénéficier de la transition énergétique. On souhaite augmenter la production énergétique, on subventionne l'implantation des bénéficiaires à coup de milliards, mais on dirait que le reste de l’appareil gouvernemental ne fonctionne pas avec le même sentiment d’urgence dans ses propres dossiers.
Si on invoque l’urgence climatique pour réduire les délais de construction de barrages, il serait tout à fait logique de réduire les délais pour l’instauration de nouvelles aires protégées, la connexion au réseau électrique triphasé pour les agriculteurs, la construction de tramway, métros, trains, pistes cyclables, la rénovation écoénergétique des logements locatifs, non?
Ce qui est bon pour pitou devrait être bon pour minou. Et ce, même si minou ne fabrique pas de batteries de Hummer…
À l’heure actuelle, un ministre au sein du gouvernement choisit les gagnants de la transition énergétique et il met toutes les conditions en place pour y arriver. Ce serait bien que ses collègues embarquent dans la parade pour que tout le monde au Québec puisse en profiter.