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Opinion  •  2 min

Une muraille pour empêcher l’arrivée des petits véhicules électriques chinois ?

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Le gouvernement fédéral consulte présentement les Canadiens sur la réponse à apporter à ce qui est présenté comme des pratiques commerciales déloyales de la Chine en matière de commercialisation de ses véhicules électriques. Les consommateurs feront-ils les frais des nouvelles mesures protectionnistes destinées à freiner l’arrivée des concurrents chinois sur le marché automobile d’ici ?

Deux avenues s’offrent au gouvernement : la première consiste à empêcher l’arrivée de petites voitures électriques bon marché par l’entremise d’une surtaxe à l’américaine de 100 %, tandis que la seconde permettrait de niveler le terrain de jeu avec une surtaxe plus douce dans une fourchette de 17 à 38 %, ce qu’ont choisi les Européens.

Selon moi, il serait hasardeux d’adopter une mesure protectionniste aussi draconienne que celle adoptée par les États-Unis.

L’Europe a plutôt choisi d’émettre une surtaxe qui va permettre de niveler le terrain de jeu, de façon à tenir compte de l’appui étatique au secteur, de l’impact environnemental de la production et des conditions de travail des employés. Équiterre favorise cette deuxième approche. Voici pourquoi.

Soif de petits modèles

D’abord, la population canadienne a soif de modèles de véhicules électriques de petite taille, une catégorie automobile presque entièrement délaissée par l’industrie nord-américaine, qui préfère mousser des modèles surdimensionnés et énergivores, qu’ils soient à essence ou électriques. Le tollé soulevé lors de l’annonce de la fin de la production de la Bolt de Chevrolet en 2023 est révélateur de ce besoin.

Cette tactique des constructeurs d’ici a un objectif principal : faire le plus de profits possible à l’aide de gros véhicules onéreux, et ce, au détriment du budget des ménages.

Résultat ? Les gens qui veulent faire l’acquisition d’un véhicule neuf abordable n’ont presque plus d’options, les modèles de petites tailles à bas prix sont en voie d’extinction depuis environ 10 ans.

C’est pourquoi le gouvernement doit tourner le dos à des tarifs trop élevés qui empêcheraient, par l’entremise d’une saine compétition, de stimuler la production nord-américaine de petits véhicules abordables.

Protéger les travailleurs

Malgré tout, il est légitime de prendre des mesures pour protéger les travailleurs et travailleuses du secteur automobile nord-américain. L’activité de plusieurs collectivités est en effet étroitement liée aux emplois bien rémunérés du secteur des transports, qui est en pleine effervescence et qui regorge d’opportunités économiques liées à la transition.

C’est important, car les besoins sont immenses pour la production de véhicules à taille humaine, d’autobus, de trains et d’infrastructures de transport collectif qui serviront à déplacer un maximum de gens dans nos villes, banlieues et régions de manière écologique et efficace.

Nos gouvernements, les constructeurs et les partenaires de la chaîne d’approvisionnement ont aussi investi d’énormes sommes dans ces capacités de production.

La réponse apportée par les autorités canadiennes devra donc s’assurer de protéger adéquatement ces investissements, les emplois et les ressources stratégiques sans tomber dans la simplicité, qui aurait comme incidence de surprotéger un secteur qui ignore largement les besoins des consommateurs, qui n’a aucune considération pour le coût de la vie, qui ne se soucie guère de la sécurité des usagers du réseau routier et qui ne réfléchit pas à l’impact de ses produits sur l’aménagement de nos villes et villages.

Bref, avant d’ériger une muraille contre les petites voitures chinoises, peut-être devrait-on regarder à l’intérieur des murs ?

Cette lettre a d'abord été publié par La Presse, le vendredi 16 août 2024.