Alors que les pays peinent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), il est impératif d'adapter nos communautés, nos villes et nos modes de vie aux conséquences du dérèglement du climat. Car même si nous atteignons la carboneutralité d’ici 2050, les impacts de la crise climatique continueront à se faire sentir.
À titre de comparaison : réduire nos émissions, c'est un peu comme freiner une automobile qui se dirige vers un mur, tandis que s’adapter, c'est mettre une ceinture de sécurité et activer les coussins gonflables pour se protéger du choc.
Comment s’adapter concrètement?
De nombreuses mesures peuvent être prises pour réduire la vulnérabilité et renforcer la résilience de nos sociétés face aux effets actuels ou futurs du dérèglement climatique. La construction de digues pour protéger les communautés côtières des inondations ou encore le développement de cultures résistantes à la sécheresse en agriculture en sont des exemples.
Certaines mesures d'adaptation peuvent aussi contribuer à réduire les émissions de GES. C’est le cas des initiatives de verdissement qui aident à réduire les îlots de chaleur urbains pendant les canicules en fournissant de l'ombre et en absorbant la chaleur, comme on l’a vu dans plusieurs villes du Québec. En même temps, ce type d’action atténue aussi les changements climatiques, puisque la végétation absorbe le CO2, le principal GES émis par nos activités qui se trouve dans l'atmosphère.
Où en est le Québec?
Quelques villes ont déjà mis en place certaines mesures d'adaptation, mais encore beaucoup de travail reste à faire.
Par exemple, cette année, à Montréal, les inondations des sous-sols résidentiels et des sorties de métro ont montré l'importance de développer des parcs et des trottoirs « éponges » pour absorber l’eau, qui ont d’ailleurs fait l’objet d’une annonce de la mairesse Valérie Plante en octobre dernier.
En revanche, en zone côtière de l'est du Québec, les municipalités sont aux prises avec d’autres enjeux comme l'érosion et la submersion. Elles nécessitent des mesures telles que la restauration des plages avec du sable, le maintien du réseau routier avec de la roche, la végétalisation des berges pour stabiliser les sols ou même, en dernier recours, la relocalisation de familles.
Il n'y a pas de mesure d'adaptation unique qui convient à tout le Québec, car chaque communauté doit trouver des réponses adaptées à ses besoins spécifiques. C’est au gouvernement provincial de leur fournir les ressources financières et techniques pour y parvenir.
Un financement trop faible
Le gouvernement provincial vise à ce que toutes les municipalités québécoises soient dotées d’un plan d’adaptation et aient évalué leurs risques climatiques d’ici 2030. Or, les mesures d’adaptation coûtent cher, et ça ne fera qu’empirer dans le futur.
En 2022, les municipalités de la province estimaient avoir besoin de 2 milliards de dollars par an pendant cinq ans pour adapter leurs infrastructures aux changements climatiques. Pourtant, l’argent offert par le gouvernement provincial ne totalise que 360 millions par an sur la même période malgré l’aide supplémentaire annoncée dans les dernières semaines.
De toute évidence, trop peu d’argent est mis sur la table pour aider les régions et les municipalités à s’adapter.
L’importance d’agir maintenant
Investir maintenant dans l'adaptation climatique permettra de faire des économies significatives en évitant des coûts supplémentaires liés aux dommages et aux perturbations causés par les impacts des événements météorologiques. Chaque dollar investi maintenant dans la mise en œuvre des principales mesures d'adaptation au Canada peut entraîner des économies à long terme de 13 $ à 15 $
L’adaptation au coeur du travail d’Équiterre
Une grande partie du travail d'Équiterre, notamment dans le domaine de l'aménagement du territoire et de la souveraineté alimentaire, s'inscrit dans le cadre de l'adaptation climatique.
En effet, les événements climatiques extrêmes ont révélé des vulnérabilités dans notre système alimentaire mondial, comme la pénurie de moutarde de Dijon que l'on a connu due à la sécheresse dans l'Ouest canadien.
Pour l’année 2024, le panier d’épicerie pourrait coûter 700 $ de plus pour une famille de quatre personnes au Québec, par exemple en raison des sécheresses au Ghana et en Côte d’Ivoire qui nuisent à la production de cacao ou des sécheresses californiennes qui limitent l’offre de choux-fleurs et d’autres légumes. Renforcer notre autonomie alimentaire représente ainsi une stratégie cruciale de résilience collective face aux perturbations climatiques.
Pour Équiterre, l’actualité récente ne laisse aucun doute quant à la nécessité d’investir dans la prévention des catastrophes et l’adaptation de nos milieux de vie.
S’adapter aux changements climatiques ne signifie pas que nous devons baisser les bras dans la réduction des GES. L'adaptation et la réduction de nos émissions doivent être mises en œuvre de manière simultanée pour limiter les dégâts humains et s’assurer que ça ne nous coûte pas plus cher. Les maladies, les décès prématurés, les relocalisations forcées et les pertes matérielles et culturelles irréversibles, comme sa maison ou son territoire natal, que ce soit en raison d’inondations ou de feux de forêt, sont autant d’exemples de tristes conséquences à anticiper, mais surtout à prévenir.