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Quand notre mission est de changer profondément les systèmes sur lesquels notre société se base, on doit s’avouer que les retombées de notre travail ne se font pas sentir immédiatement. Les graines qui ont été semées prennent plusieurs saisons avant de porter fruit. Nos messages et nos recommandations de solutions, on les répète et répète à maintes reprises, et on ne lâche pas, parce qu’on sait qu’à force de continuellement taper sur le clou, on finit par avoir des résultats.
Dans mon rôle de directeur des relations gouvernementales chez Équiterre, je suis encouragé de voir les réactions récentes de certains membres de notre gouvernement provincial. Encouragé? Vraiment? Comment pourrais-je être encouragé après un été de feux de forêt sans précédent, de déluges, de smog?
Je suis encouragé parce qu’on entend de plus en plus nos recommandations sortir de la bouche de nos décideurs et décideuses, dans les médias et dans les conversations entre amis. Bref, on fait avancer le discours environnemental sur la place publique. Cette première étape est essentielle pour que l’action se concrétise.
C’est dommage de devoir attendre que l’urgence climatique nous frappe de plein fouet avant d’enfin réagir et prendre les mesures nécessaires, mais les changements climatiques dictent maintenant la réalité politique et provoquent une prise de conscience et des changements dans l’appareil gouvernemental. Des exemples? J’en ai quelques-uns :
Benoit Charrette, notre ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, a récemment annoncé que le gouvernement confiera un mandat à un groupe d’experts afin de faire des recommandations « sur la grande problématique qu’est l’adaptation aux changements climatiques ». Chez Équiterre, nous demandons une stratégie sur l’adaptation depuis plusieurs années et nous continuons de pousser en ce sens, en espérant que ce comité fera preuve d’audace et de transparence. Maintenant qu’on a une nouvelle structure en place, les bonnes intentions devront faire place à un plan d’action concret.
Éric Girard, notre ministre des Finances, reconnaît maintenant qu’avec les impacts fiscaux des nombreux événements climatiques extrêmes de cette dernière année, « on ne peut pas passer à côté (…) il va y avoir plus d’argent pour l’adaptation aux changements climatiques ». Il parle même de mesures d’écofiscalité pour changer les habitudes de mobilité et ainsi s’attaquer aux GES du secteur des transports. (Mais ça, c’est un sujet pour un autre billet de blogue.)
Pierre Fitzgibbon, notre ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, sait que la croissance de notre parc automobile est une aberration et qu’il faut le réduire de moitié. Oui, nous devons remplacer les hydrocarbures par les énergies renouvelables dans nos déplacements, mais nous ne devons pas remplacer chaque véhicule à essence par un véhicule électrique. Miser davantage sur la mobilité partagée, collective et active est la clé du succès.
François Bonnardel, notre ministre de la Sécurité publique, présent sur le terrain pour gérer les impacts des inondations majeures en Beauce jusqu’à la tempête Fiona aux Îles-de-la-Madeleine, reconnaît que son ministère doit également prendre acte de l’urgence d’agir sur les changements climatiques. « On a un constat qui est clair, net et précis : les changements climatiques nous frappent. On doit réagir, et on doit mettre les sommes conséquentes pour sécuriser le Québec », admet-il.
Cette prise de conscience est forte au gouvernement, car elle est motivée par les grosses sommes qu’on est en train de payer et qu’on projette de devoir payer à cause du dérèglement climatique. On ne doit plus simplement protéger l’environnement, il faut maintenant protéger le Québec. Et ça coûte cher! On voit à quel point ce n’est plus juste le ministère de l’Environnement qui doit intervenir pour gérer les impacts économiques, sociaux et environnementaux de cette réalité. Ce sont des enjeux transversaux qui nécessitent des réponses transversales.
Le futur du Québec se joue maintenant
Ce n’est pas le développement industriel dans le secteur de la batterie de véhicules qui va nous sauver. Ce sont les grandes décisions sur la façon dont nous aménageons notre territoire et nos villes, de sorte que tous les individus, toutes les familles, toutes les entreprises, toutes les organisations et instances politiques puissent réussir à bien vivre tout en ayant une plus petite empreinte environnementale et énergétique. C’est la mise à jour de nos priorités au sujet de notre précieuse énergie hydroélectrique renouvelable. C’est de statuer sur ce qu’on fait (ou ne fait pas) avec nos forêts, nos cours d’eau, nos terres agricoles nourricières qui captent le carbone. Malheureusement, on ne peut pas toujours tout concilier — il faut faire des choix.Le gouvernement encaisse maintenant le choc que représente la réalité des changements climatiques. Il a le dos au mur. On doit continuer de foncer, de taper sur les clous, de mettre de la pression. Car nos idées cheminent, et le gouvernement réalise maintenant à quel point il doit les considérer.
On a besoin de vous pour continuer de mettre de la pression
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