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Mettre un prix sur le carbone est une mesure essentielle dans la lutte aux changements climatiques, car il réduit la pollution et stimule l’innovation économique.
La récente annonce du gouvernement fédéral appliquera la tarification du carbone dans toutes les provinces qui n’avaient pas déjà un système en place.
Voici un questions-réponses pour vous aider à comprendre l’importance de la tarification du carbone dans la mise en oeuvre du plan climat canadien et les différences entre le prix carbone adopté par le Québec et celui imposé à d’autres provinces.
POURQUOI METTRE UN PRIX SUR LA POLLUTION CARBONE?
La pollution par le carbone n'est pas gratuite. Les Canadien-ne-s en voient les effets lorsque des conditions météorologiques extrêmes mettent en péril leur sécurité, leur santé, leurs communautés et leur gagne-pain. Ils en paient le prix sous forme de réparations des infrastructures et de coûts plus élevés pour les primes d'assurance, la nourriture, les soins de santé et les services d'urgence. Les changements climatiques devraient coûter 5 milliards de dollars par année d'ici 2020 à l'économie canadienne.
Le gouvernement du Canada estime le « coût social » (donc le coût total des impacts des changements climatiques) du carbone à environ 41 $ la tonne de CO2, alors que plusieurs analyses économiques le situent à 100 $ la tonne. Le système de tarification carbone fédéral appliquera un prix carbone de 20 $ la tonne en 2019, donc encore bien en-dessous du coût réel des changements climatiques. Le prix carbone fédéral augmentera jusqu’à 50 $ la tonne en 2022.
Un prix carbone vise à instaurer le principe de l’internalisation de tous ces coûts, pour que le prix d’un bien (dans ce cas-ci : l’énergie et les biens produits à base d’hydrocarbures) reflète tous les coûts que la production et l’utilisation de ce bien occasionnent à la société. Sans la tarification du carbone, le prix du pétrole, par exemple, ne couvre pas tous ces coûts associés.
COMMENT LA TARIFICATION DU CARBONE RÉDUIT-ELLE LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE (GES)?
Un prix sur la pollution carbone est un outil pour mettre en œuvre le principe du pollueur-payeur, qui exige que les personnes (ou entreprises) qui génèrent de la pollution assument leur part des coûts pour les mesures de prévention, de réduction et de contrôle des GES. Si ces personnes ou entreprises veulent éviter ces coûts supplémentaires, elles devront trouver des moyens de les éviter, en changeant leurs habitudes et pratiques.
La tarification de la pollution par le carbone offre des avantages économiques parce qu'elle encourage les Canadiens et les entreprises à faire preuve d'innovation et à investir dans des technologies propres et des possibilités de croissance durable qui amèneront le Canada vers une contribution plus propre et plus écologique à l’économie mondiale. Un prix carbone qui augmente dans le temps est essentiel pour envoyer un signal clair qu’il sera de plus en plus avantageux d’investir dans les énergies propres et les technologies pour réduire la pollution carbone.
Comme le démontrent les systèmes de tarification carbone au Québec et en Colombie-Britannique, la tarification carbone a réduit les GES dans ces provinces tout en permettant une croissance économique continue. Selon la Banque mondiale, 70 administrations dans le monde, qui représentent à peu près la moitié de l’économie mondiale, mettent un prix sur la pollution carbone.
POURQUOI LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL IMPOSE T-IL UN PRIX CARBONE AUX PROVINCES RÉCALCITRANTES?
Le Nouveau-Brunswick, l’Ontario (ayant tout récemment annulé leur participation à la bourse carbone sous le nouveau gouvernement conservateur), la Saskatchewan et l’Île-du-Prince-Édouard n’ont pas de système de tarification du carbone, donc seront dorénavant forcées d’appliquer le système de tarification carbone imposé par le gouvernement fédéral. Chacun des gouvernements provinciaux ont leurs raisons de s’opposer à un prix sur le carbone, d’abord économiques et de protection de certaines industries. Le système du gouvernement fédéral prend certaines de ces différences régionales en compte, mais souligne la nécessité que les coûts de la pollution par le carbone soient internalisés dans son prix pour la prospérité à long terme de notre environnement et de notre économie.
POURQUOI LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL RETOURNE T-IL LES REVENUS DE LA TARIFICATION CARBONE AUX MÉNAGES DE CES PROVINCES?
Le gouvernement fédéral retournera aux provinces « forcées » d’adopter un prix sur le carbone une partie des revenus perçus par la tarification carbone directement aux ménages. Il s’agit d’une somme fixe par adulte et enfant pour chaque ménage. Les ménages à plus faibles revenus, donc qui ont une empreinte carbone moindre, se verront donc rembourser un montant égal et peut-être supérieur à l’augmentation du coût des biens. Pour les ménages mieux nantis, donc qui polluent plus, ils devront payer un coût net en fin d’année, à moins qu’ils ne réduisent leur pollution carbone. À noter que les citoyens de ces provinces paieront plus chers pour leur chauffage, essence, etc. et que le gouvernement fédéral conserve une partie des revenus pour réinvestir dans des programmes pour faciliter les réductions de GES dans ces provinces. Elles subiront ainsi l’ingérence du fédéral sur la façon dont les revenus générés seront redistribués, contrairement au Québec qui, pour sa part, réinvestit tous les revenus de sa bourse carbone dans des mesures de lutte aux changements climatiques par l’entremise du Fonds Vert.
Les études démontrent clairement que c’est l’augmentation du coût des biens dans les transactions de tous les jours qui fournissent un incitatif aux individus et aux entreprises à réduire leurs GES afin d’éviter de payer le prix carbone, indépendamment d’un éventuel remboursement (partiel ou total) en fin d’année.
COMMENT LE NOUVEAU PRIX SUR LE CARBONE DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL NOUS AFFECTE AU QUÉBEC?
Le système fédéral de tarification du carbone ne s’applique qu’aux provinces qui n’avaient pas de système déjà en place. Comme le Québec est l’un des leaders faisant déjà partie de la bourse carbone, il ne sera pas assujetti au système de tarification carbone fédéral et donc rien ne change pour les entreprises et les citoyen-ne-s québécois-es. Par contre, tous nos concitoyens à travers le Canada paieront à compter de 2019 leur part du coût de la pollution carbone, donc notre pays fait un pas dans la bonne direction pour la réduction des GES. De plus, une tarification carbone plus uniforme à l’échelle canadienne augmente l’efficacité du système en évitant des impacts négatifs sur la concurrence de certaines entreprises et réduit la possibilité de « fuite de carbone » - soit de déplacer la production vers des juridictions n’ayant pas de tarification carbone.
Depuis son entrée en fonction, le système québécois a généré 2,6 milliards $, qui servent à financer la lutte aux changements climatiques.
INVESTIR DANS LE FUTUR
Les économistes constatent que l’imposition d’une tarification sur le carbone est le moyen le plus efficace de réduire les émissions. Il se doit d’être appliqué de concert avec d’autres politiques climatiques qui réduiront les GES là où la tarification carbone n’a pas d’incidence. Les systèmes en place dans les provinces ainsi que le nouveau système fédéral réduiront les GES de 50 à 60 Mt d’ici 2030.
Faire payer les pollueurs et les inciter à réduire les GES par la tarification carbone réduira les coûts futurs des changements climatiques, une facture qui deviendra de plus en plus salée. Ne refilons pas cette dette à nos enfants et petits-enfants ; commençons à y contribuer dès maintenant.