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Monsieur Trudeau, la période des Fêtes approche à grands pas. Équiterre a donc rédigé sa liste de souhaits pour renforcer le nouveau projet de Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité (projet de loi C-12).
Par Émile Boisseau-Bouvier, analyste des politiques climatiques
Petit rappel sur le projet de loi C-12
Pour ceux qui ne suivent pas assidûment la politique au niveau fédéral, peut-être avez-vous manqué le dépôt du projet de loi C-12 en novembre dernier.
En gros, C-12, qu’on pourrait aussi appelé «loi climat» pour faire court, vise «à fixer des cibles nationales de réduction des émissions de gaz à effet de serre au Canada, en vue de l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050».
Et pour être bien honnête, Équiterre croit que ça représente un important progrès dans l’établissement d’un cadre de responsabilité climatique pour le Canada qui, il faut le rappeler, a échoué à atteindre toutes les cibles internationales qu’il s’est fixées depuis des décennies.
Le problème c’est que le projet de loi dans sa forme actuelle fournit malheureusement peu de garanties que cette tendance s’inverse...
Des modifications seront donc essentielles afin de nous mener sur la bonne voie.
Notre liste de souhaits
1. De l’action, dès maintenant!
La science est claire: la lutte aux changements climatiques doit s’accélérer dès aujourd’hui et il est impératif que les cibles pour 2030 soient renforcées afin de maintenir le réchauffement climatique sous 1,5 °C.
Afin de tracer la voie vers la carboneutralité d’ici 2050, le gouvernement a intégré des jalons (qu’on pourrait aussi nommés des «cibles intermédiaires») aux cinq ans dans son projet de loi. Toutefois, ces jalons ne débutent qu’en 2030 alors qu’un jalon intermédiaire en 2025 était attendu.
Nous ne pouvons nous permettre de patienter encore 10 ans; la reddition de comptes devrait commencer dès maintenant, pas en 2030!
2. Des mesures contraignantes essentielles
Aucune mesure contraignante ne se retrouve dans le projet de loi. Le gouvernement se dote donc de cibles de réduction à atteindre lors des années jalon, mais rien ne l’oblige à les atteindre. L’intégration de budgets carbone, élaborés un peu comme des budgets financiers, permettrait de corriger cette lacune.
La bonne volonté ne suffit plus. L’obligation de résultat est nécessaire.
3. Donner des dents aux chiens de garde
Le projet de loi établit aussi un nouvel organisme consultatif chargé de conseiller le ministre de l’Environnement sur l’atteinte de la carboneutralité en 2050 et sur les questions qui lui sont soumises par celui-ci. Le rôle de cet organisme doit être renforcé et consolidé.
De plus, Il est fondamental que l’organisme consultatif soit composé d’experts indépendants qui ont la capacité et les ressources pour mener des études détaillées pour conseiller le gouvernement sur ses cibles, ses plans, et pour faire le suivi et la surveillance de son progrès.
La législation demande aussi au commissaire à l’environnement et au développement durable de préparer des rapports sur l’implantation des mesures à chaque cinq ans.
Ces deux institutions n’ont ni le mandat ni la capacité de tenir le gouvernement responsable de ses actions. Présentement, ni l’une ni l’autre a un mandat explicite d’aviser les cibles pour les années jalon. Ces chiens de garde devraient être impliqués à toutes les étapes nous menant vers la carboneutralité et non pas seulement lorsque le gouvernement le désire.
Le plus beau des cadeaux
Si on résume, les trois amendements qu’on propose ici permettraient au Canada de renforcer sa Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité et de crédibiliser son plan pour faire sa part contre les changements climatiques.
Nous espérons sincèrement que nos vœux des Fêtes seront exaucés. Après tout, le plus beau cadeau qu’on puisse se faire collectivement n’est-il pas une planète en santé?