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Lettre ouverte: DANS CES CONDITIONS, C’EST ROYALEMENT NON !
Par: Émile Roux et Coralie Deny, respectivement directeur général de destination centre-ville, et directrice générale du conseil régional de l'environnement de Montréal, et 18 signataires *
Nous sommes une coalition de représentants des milieux d’affaires, écologistes, universitaires, professionnels, institutionnels et citoyens mobilisés contre la réalisation du mégaprojet Royalmount dans sa forme actuelle. Nous nous sommes réunis pour réitérer que ce mégaprojet de déplacement économique, plutôt que de développement économique, serait néfaste pour la mobilité, le commerce, la culture et l’emploi de la métropole. Il est inconcevable qu’il ait pu être approuvé par la seule Ville de Mont-Royal (20 000 habitants), au détriment de la moitié de la population du Québec, et il est urgent d’y remédier.
Nous sommes favorables à la revitalisation de ce site stratégique, mais nous souhaitons qu’il accueille un projet véritablement mixte, arrimé aux démarches en cours dans le secteur Namur-De la Savane et compatible avec l’écosystème économique du Grand Montréal. Dans une forme complètement révisée et mieux réfléchie, ce mégaprojet pourrait devenir un exemple de développement durable et s’inscrire dans le type d’aménagement souhaité dans l’agglomération.
Pour ce faire, nous invitons Carbonleo, la Ville de Mont-Royal, l’agglomération de Montréal et le gouvernement du Québec à interrompre le mégaprojet Royalmount et à collaborer pour en réduire ensemble l’envergure. Un moratoire est nécessaire.
CARBONLEO DOIT RETOURNER À LA PLANCHE À DESSIN
Tout au long des audiences de la Commission de l’agglomération de Montréal sur les impacts de son mégaprojet, le promoteur, Carbonleo, a répondu aux critiques des élus et de la société civile en l’ajustant à la marge. Il y a ainsi greffé une passerelle piétonnière au-dessus de Décarie, une navette électrique vers le REM et des milliers de logements en bordure de l’extrémité ouest du complexe.
Il s’est abstenu de remettre en question la vision globale de son mégaprojet, qui risque de fragiliser l’écosystème culturel et commercial de la métropole.
L’envergure et la nature du mégaprojet Royalmount exigent qu’il soit révisé en profondeur dans l’optique d’un développement économique et social structuré et cohérent pour la métropole. Pour en assurer l’acceptabilité sociale, le promoteur doit retourner à la planche à dessin et consulter la population et les experts du Grand Montréal.
MONT-ROYAL DOIT TRAVAILLER AVEC QUÉBEC ET SES PARTENAIRES
Depuis 2015, la Ville de Mont-Royal a fait cavalier seul pour autoriser la réalisation de ce mégaprojet.
Alors qu’il lui serait fiscalement très profitable, il serait extrêmement dommageable pour les commerces, les entreprises, les restaurants, les salles de spectacle et les travailleurs des arrondissements et des villes qui l’entourent. Les répercussions estimées du mégaprojet Royalmount en matière de mobilité, de commerce, de culture et d’emploi, de même que leur gestion, débordent considérablement tant son territoire que ses champs de compétences. Qu’elle s’entête à l’imposer au Grand Montréal envoie un déplorable signal de défiance et de développement subordonné au profit économique local.
La réinitialisation de la gouvernance du mégaprojet Royalmount est une condition essentielle de son acceptabilité politique. Mont-Royal doit accepter d’instaurer un moratoire sur la réalisation du mégaprojet et de travailler avec Québec et ses partenaires de l’agglomération afin de rétablir l’harmonie et la concertation au sein de la métropole en matière d’aménagement et de développement.
L’AGGLOMÉRATION DE MONTRÉAL DOIT EXIGER UN MORATOIRE
Par les audiences et le rapport de sa commission, l’agglomération de Montréal a révélé avec force les lacunes de la planification et de la gouvernance de la métropole qu’ont exploitées la Ville de Mont-Royal et le promoteur. Elle doit maintenant jouer un rôle crucial de médiateur entre les villes qu’elle regroupe et jeter les bases d’un chantier voué à pallier ces lacunes.
La révision en profondeur de l’approche de planification du Royalmount est une condition essentielle de son intégration harmonieuse à son milieu. L’agglomération doit exiger un moratoire pour que toutes les parties prenantes puissent repenser ensemble le mégaprojet et tout le secteur dans une perspective intégrée.
QUÉBEC DOIT INTERVENIR
Le battage médiatique entourant les audiences de l’agglomération a révélé que les ministres Bonnardel et Rouleau se préoccupent des impacts gigantesques qu’aurait le mégaprojet Royalmount sur le cœur économique du Québec, particulièrement en matière de fluidité de la circulation. Si Carbonleo, la Ville de Mont-Royal et l’agglomération de Montréal ne s’entendent pas pour instaurer un moratoire et le réviser conjointement, le mégaprojet devra être suspendu par une intervention gouvernementale.
L’instauration d’un moratoire sur sa réalisation est une condition sine qua non de l’équilibre de l’économie métropolitaine, de la mobilité durable, de la santé publique et de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le gouvernement doit faire comprendre aux parties prenantes qu’il n’entend pas se faire dicter la construction d’infrastructures de transport, et qu’un moratoire serait préférable à des mesures législatives ou réglementaires prohibitives. Parce que dans ces conditions, c’est royalement non !
* Signataires :
André Lavallée, ancien élu responsable de l’urbanisme, de l’aménagement et du transport à la Ville de Montréal ;
Antonin Labossière, architecte et associé principal, Rayside Labossière ;
Caroline Tessier, directrice générale, Association des sociétés de développement commercial de Montréal ;
Catherine Champoux, directrice administrative, Emballages Creopack ;
Christian Savard, directeur général, Vivre en Ville ;
Christian Yaccarini, président et chef de la direction, Société de développement Angus
Claude Vaillancourt, président, ATTAC-Québec ;
Gérard Beaudet, codirecteur de l’Observatoire de la mobilité durable, Université de Montréal ;
Glenn Castanheira, conseiller principal, Brique & Mortier ;
Jacques K. Primeau, président, Partenariat du Quartier des spectacles ;
Jean Paré, urbaniste émérite et ancien commissaire, Office de consultation publique de Montréal ;
Jean-Claude Marsan, architecte, urbaniste et professeur émérite, Université de Montréal ;
Karel Mayrand, directeur général pour le Québec et l’Atlantique, Fondation David Suzuki ;
Linda Centomo, directrice du développement des affaires, Les Conseillers BCA Consultants Inc. ;
Paula Negron-Poblete, codirectrice de l’Observatoire de la mobilité durable, Université de Montréal ;
Raphaël Fischler, professeur titulaire à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage, Université de Montréal ;
Ron Rayside, architecte et associé principal, Rayside Labossière ;
Sarah V. Doyon, directrice, Trajectoire Québec ;
Sidney Ribaux, directeur général, Équiterre ;