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MONTRÉAL, 20 octobre 2021 – Équiterre dévoile aujourd’hui un rapport qui sonne l’alarme sur l’une des principales menaces à l’atteinte des cibles climatiques du Québec et du Canada: la place grandissante des camions légers sur ses routes.
Intitulé « Comprendre la hausse des camions légers au Canada afin de renverser la tendance : synthèse », le document regroupe huit (8) études menées en partenariat avec le CIRANO, HEC Montréal et la Chaire Mobilité de Polytechnique Montréal, et cherche entre autres à mettre en lumière l’impact de la préférence croissante de la population canadienne pour les véhicules énergivores et surdimensionnés, dont les véhicules utilitaires sport (VUS).
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« C’est simple : si tous les paliers de gouvernement veulent être pris au sérieux dans la lutte à la crise climatique, ils devront s’attaquer à la problématique des camions légers parce que leur prolifération est en train d’anéantir tous nos efforts en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et d’électrification des transports », explique Andréanne Brazeau, analyste en mobilité chez Équiterre.
« Outre l’exploitation des énergies fossiles, la décarbonisation du parc de véhicules est probablement le plus gros défi climatique de la prochaine décennie, puisqu’à l’heure actuelle, les émissions de GES du Canada continuent d’augmenter. La normalisation des camions légers, confirmée par l’augmentation de 306 % de leur nombre sur nos routes entre 1990 et 2018, explique justement cette hausse en grande partie », ajoute l’experte.
Quelques faits saillants
En plus de l’impact environnemental de ces véhicules, le rapport fait aussi état d’importants impacts en matière d’utilisation de l’espace, de circulation, de sécurité routière et de finances personnelles.
Climat et environnement
Entre 1990 et 2018, les émissions de GES des camions légers ont augmenté de 161 % (3580 à 9338 kilotonnes d'équivalent CO2), tandis que celle des voitures à essence a diminué de 9 % (10 649 à 9664 kt éq. CO2) au Québec.
Même avec les subventions gouvernementales, les véhicules électriques ne représentaient que 6 % du marché en 2019 contre 69 % pour les camions légers. La même année, pour chaque véhicule électrique vendu, environ 11 camions légers ont été vendus.
Utilisation de l’espace
En près de 20 ans, l’espace total occupé par les véhicules de promenade dans la grande région de Montréal a grimpé de 45,5 %, passant de 1338 à 1948 hectares sous l’effet combiné de l’augmentation du nombre de véhicules par ménage et de la présence accrue de véhicules plus gros dans le parc automobile. C’est donc l’équivalent d’environ 17 parcs Lafontaine qui a été perdu.
Circulation routière
Plus la longueur moyenne des véhicules composant le parc automobile est élevée, plus la fluidité de la circulation diminue et plus le temps perdu en congestion augmente; si l’ensemble des véhicules en circulation étaient des Ford F-150, il faudrait environ 2 fois moins de véhicules pour atteindre le seuil de congestion que s’ils étaient des Smart Fortwo et 2,2 fois plus de temps pour parcourir 5 kilomètres.
Sécurité routière
La littérature indique que plus un véhicule est lourd, plus la fréquence des collisions et le risque de mortalité des personnes impliquées dans une collision sont élevés. Selon les données de 2019 de la SAAQ, la gravité des blessures infligées aux piéton.ne.s semble influencée par le type de véhicule impliqué dans une collision : pour les accidents qui entraînent au moins une personne blessée, il y a une plus grande proportion de piéton.ne.s blessé.e.s gravement lorsqu’un VUS est impliqué (10,6 %) par rapport à lorsqu’aucun camion léger n’est impliqué (6,7 %).
Enfin, les statistiques semblent montrer que les individus heurtés par des camionnettes ou des minivans ont plus de chances de succomber à la collision que les personnes heurtées par les autres types de véhicule.
Finances personnelles
Comparativement aux voitures standards, les camions légers coûtent en moyenne 40 % ou près de 10 000 $ plus cher à l’achat et 15 % plus cher en frais de carburant, un constat qui contribue à alourdir les dépenses déjà importantes que les ménages consacrent au transport privé annuellement.
Entre 1981 et 2019, elles ont en effet augmenté de 58 %, passant de 6159 $ à 9766 $ (+3608 $ en dollars constants de 2012). Celle-ci est attribuable à l’augmentation du nombre de véhicules par ménage et de leur taille.
Les 7 recommandations d’ÉquiterrE
Le rapport présente les recommandations phares d’Équiterre destinées au gouvernement fédéral pour renverser cette dangereuse tendance :
- Reconnaître la hausse des camions légers comme un enjeu de santé publique et de sécurité publique
- Former un comité consultatif indépendant pour mieux encadrer le secteur et accompagner le gouvernement
- Répertorier les accidents de la route en fonction du type de véhicule conduit
- Mettre en place des mesures permettant de réduire l’offre de gros véhicules
- Mettre en place des mesures permettant de réduire la demande de gros véhicules:
- Instaurer un système de redevance-remise
- Continuer à augmenter le prix du carbone
- Lancer un programme national de mise au rancart des véhicules énergivores
- Accroître progressivement la réglementation entourant la publicité automobile. Quelques exemples:
- Exiger l’affichage des émissions de CO2 et de la consommation de carburant du véhicule
- Vulgariser les informations liées aux externalités négatives des véhicules comme pour la cigarette
- Restreindre la représentation de la nature et l’utilisation de valeurs environnementales
- Exiger une part croissante d’investissements en publicité de véhicules zéro émission
- Déployer des campagnes de promotion de la mobilité durable
Pour consulter le rapport complet »
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Pour plus d’informations :
Anthony Côté Leduc, relations médias, Équiterre
514 605-2000, acoteleduc@equiterre.org