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Saint John’s, T.-N.-L./Territoire traditionnel des Beothuk et des Mi’kmaq - Équiterre et la Fondation Sierra Club Canada contestent la décision du ministre de l'Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, d'approuver le projet Bay du Nord d'Equinor, un projet pétrolier et gazier controversé de 12 milliards de dollars au large des côtes de Terre-Neuve-et-Labrador.
Ecojustice, au nom d'Équiterre et de la Fondation Sierra Club Canada, a déposé la poursuite contre le ministre de l’Environnement et du Changement climatique à la Cour fédérale le 6 mai. Les groupes affirment que l'approbation du projet va à l'encontre des obligations internationales du Canada et de l'appel pressant à réduire les émissions mondiales, alors que la réalité de l'urgence climatique devient de plus en plus alarmante à chaque événement météorologique grave.
Le ministre a approuvé le projet Bay du Nord seulement quelques jours après la sortie du dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) qui mettait clairement en garde contre la simple réduction des émissions, soulignant qu’elle n'était plus suffisante pour enrayer la crise climatique. Le chef des Nations Unies a même qualifié de bavure morale et gaspillage économique que de continuer de le financer de nouveaux projets de combustibles fossiles.
Aussi, bien que le ministre insiste sur les 137 conditions que Bay du Nord devra respecter - dont une condition selon laquelle le projet devra être à zéro émission de gaz à effet de serre d'ici 2050, cet objectif ne tient nullement compte des émissions massives en aval que le projet générera.
La rhétorique de l'industrie et des gouvernements selon laquelle on saurait produire du ‘pétrole propre’ omet que le processus d'extraction du pétrole ne représente que 10 % des émissions d'un projet pétrolier. En fait, les 90 % restants proviennent de la combustion du pétrole. Les estimations les plus récentes indiquent que Bay du Nord pourrait produire entre 300 millions et un milliard de barils de pétrole au cours de sa durée de vie. Autrement dit, près de 400 millions de tonnes de carbone, soit l'équivalent des émissions de GES 7 à 10 millions d’autos de plus sur nos routes par an.
L'AGA d'Equinor en Norvège fait face à l'opposition des groupes environnementaux et du public
Alors qu'Equinor envisage une décision finale d'investissement dans le projet lors de son assemblée générale annuelle aujourd’hui. Équiterre, Sierra Club, LeadNow, Stand appuyés de groupes environnementaux et de citoyen.nes locaux ont organisé une projection saisissante sur le bâtiment de l'AGA d’Équinor à Stavanger. La projection incluait des témoignages de Canadien.nes opposé.es au projet Bay du Nord portant ainsi leurs messages à la Norvège sur les risques de Bay du Nord pour l'habitat marin et le climat.
Le mercredi 11 mai, les organisations environnementales canadiennes ont également placé une publicité dans le journal norvégien Stavanger Aftenblad, le quotidien de la ville où se tient l'AGA d'Equinor. Mettant en vedette une photo du littoral de Terre-Neuve, l'annonce demande aux norvégien.nes d'aider les Canadien.nes à arrêter Bay du Nord et de protéger leur environnement. Parallèlement, des citoyen.nes inquiet.es manifesteront devant le bureau canadien d'Equinor à Saint John's, à Terre-Neuve-et-Labrador, aujourd’hui à midi (NDT).
Les groupes environnementaux impliqués dans le procès ont déclaré ce qui suit :
« Le feu vert donné à Bay du Nord aura pour conséquence de retarder la transition et de verrouiller le développement économique des collectivités de Terre-Neuve-et-Labrador dans l'exploitation des hydrocarbures. Cette décision fait fi des avertissements des scientifiques et ne cadre ni avec nos obligations domestiques et internationales, ni avec notre devoir moral vis-à-vis les générations présentes et futures. Ce projet représente une menace pour nos écosystèmes marins et nos objectifs de réduction des émissions de GES. Considérant tous les impacts à long terme, nous n'avons d'autre choix que de faire cette demande de contrôle judiciaire auprès de la Cour Fédérale », affirme Colleen Thorpe, directrice générale d'Équiterre.
James Gunvaldsen Klaassen, avocat, Ecojustice
«La décision du ministre d'approuver le projet Bay du Nord manque de vision et ne tient pas compte des importantes émissions en aval qui seraient générées par ce mégaprojet. Le gouvernement fédéral a fait de nombreuses promesses pour faire sa part dans la lutte contre le changement climatique, mais comme le démontre cette décision, ces promesses relèvent plus du discours que de l'action à ce stade. Nous ne pouvons pas ignorer les émissions en aval lorsque nous évaluons des projets comme celui de Bay du Nord. Les projets que nous générons au Canada ont un impact mondial et nous devons cesser d'exporter nos émissions et la crise climatique à l'étranger pour que d'autres s'en occupent tout en continuant à faire des profits chez nous. Le gouvernement a reconnu que notre marge de manœuvre pour atténuer les pires effets du changement climatique se referme rapidement et que l'atteinte d'objectifs critiques à long terme exige une action immédiate. Bay du Nord enfermera la province et le Canada dans une dépendance accrue aux combustibles fossiles à un moment où la science exige que nous fassions la transition des combustibles fossiles vers des sources d'énergie plus propres et durables.»
Gretchen Fitzgerald, Directrice nationale des programmes, Fondation Sierra Club Canada
« Juste avant l'approbation de Bay du Nord, le Secrétaire général de l'ONU a déclaré qu'investir dans de nouveaux projets pétroliers était une ‘folie morale et économique’ - nous n'avions donc pas d'autre choix que de contester cette approbation. Le Canada doit cesser de rompre ses promesses en matière de climat et doit protéger les communautés contre les impacts d'un changement climatique galopant, telles que les inondations côtières, les tempêtes sans précédent, la perte de la couverture de glace nécessaire à la chasse et à la pêche traditionnelles, et la perturbation des chaînes d'approvisionnement.
Nous devons également sortir de la spirale infernale des chocs pétroliers qui ne fera que devenir qu’empirer avec le déclin des marchés pétroliers. Nous savons qu'il existe des voies meilleures et plus sûres pour les travailleur.ses du secteur des combustibles fossiles afin qu'ils puissent participer aux opportunités croissantes dans les secteurs de l'éolien, du solaire et de l'efficacité énergétique. Nous continuerons à faire pression pour obtenir le financement gouvernemental nécessaire à ces opportunités, tout en combattant ce projet bec et ongles.
Non seulement l'évaluation du projet n'a pas tenu compte des émissions de gaz à effet de serre, mais l'évaluation environnementale a également ignoré l'avis des scientifiques du gouvernement concernant le risque pour les mammifères marins - y compris les espèces menacées - les coraux et les espèces marines des grands fonds. À une profondeur de plus d'un kilomètre, le projet est le plus profond projet de forage de production de l'histoire du Canada atlantique et il faudrait de 18 à 36 jours afin d’absorber une fuite de pétrole similaire à celle de Deepwater Horizon. Une éruption et un déversement de pétrole incontrôlés au milieu du nord de l'Atlantique pendant des semaines serait une catastrophe pour les pêcheries et la vie océanique - sans parler de la réputation internationale du Canada. »
Lien vers les photos des projections et de la manifestation
Pour plus d'information:
Anthony Côté-Leduc, Relations Médias, Équiterre
(514) 605-2000 ; acoteleduc@equiterre.org
Zoryana Cherwick, Communications Specialist, Ecojustice
1-800-926-7744 ext. 277 ; zcherwick@ecojustice.ca
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